L’article 418 du code de procédure pénale dispose : "Toute personne qui prétend avoir été lésée par un délit, peut, si elle ne l’a déjà fait, se constituer partie civile à l’audience même."
La constitution en partie civile peut se faire par voie d’intervention lorsque l’action publique a été mise en mouvement et par voie d’action dans le cas contraire.

L’article 48-2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse dispose que "toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, qui se propose, par ses statuts, de défendre les intérêts moraux et l’honneur de la Résistance ou des déportés peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne l’apologie des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des crimes ou délits de collaboration avec l’ennemi et en ce qui concerne l’infraction prévue par l’article 24 bis".

En l’espèce, à deux reprises, des propos pénalement punissables ont été publiés dans un journal lors de l’interview d’un invité. La première fois, une information avait été ouverte sur réquisitions du ministère public. La seconde fois, une autre information avait été ouverte sur la plainte avec constitution de partie civile de l’association Fils et filles des déportés juifs de France (FFDJF). Dans les deux cas, l’invité interviewé, la directrice de publication ainsi que le journaliste ont été renvoyés devant la juridiction correctionnelle. La première fois pour apologie de crime de guerre et complicité et la seconde pour contestation de crimes contre l’humanité et complicité.

Les premiers juges, ont joint les poursuites, et ont déclaré recevables, au regard des dispositions de l’article 48-2 de la loi du 29 juillet 1881, les constitutions de partie civile du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP), de la Fédération nationale des déportés et internés, résistants et patriotes (FNDIRP) et de la Ligue pour la défense des droits de l’homme et du citoyen (LDH).

La Cour d’appel infirme la décision des juges du fonds. Selon elle, en matière de presse, l’acte initial de poursuite [1] fixe irrévocablement la nature, l’étendue et l’objet de celle-ci ainsi que les points sur lesquels le prévenu aura à se défendre. Ainsi, aucune personne ne saurait être admise à intervenir comme partie civile dans la procédure déjà engagée à l’initiative d’une autre partie civile ou du parquet. Le MRAP s’est constitué partie civile dans l’information ouverte sur réquisitoire introductif du parquet [2] . La FNDIRP, et la LDH se sont chacune constituées parties civiles à l’audience du tribunal. Par conséquent, leur constitution de partie civile est irrecevable.

Suite à cette décision, le MRAP et la FNDIRP décident de former conjointement un pourvoi en cassation.

La Cour de cassation, casse la décision de la Cour d’appel au visa de l’article 48-2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. La Haute juridiction judiciaire estime qu’aucune disposition ne fait obstacle à l’intervention d’une association habilitée par l’article précité et qui entend se constituer partie civile dans une procédure engagée par une autre partie ou le ministère public du chef des infractions visées par ce texte.

[1L’acte de poursuite est, au sens large, tout acte qui déclenche l’action publique (avertissement, convocation par procès-verbal, comparution immédiate, comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, citation directe, plainte avec constitution de partie civile, réquisitoire introductif), ou qui permet son exercice jusqu’à son aboutissement (réquisitoire supplétif, réquisitoire définitif, exercice des voies de recours...).
Dans un sens plus restreint, l’acte de poursuite est un acte interruptif de la prescription de l’action publique.

[2Document écrit de la procédure par lequel le Ministère Public décide de saisir le juge d’instruction.